Le blog de Méthodo Campus : Pratique et théorie des méthodes d'apprentissage

Comment comprendre les concepts abstraits : l’exemple de la méthode de Singapour

Comment bien saisir le sens des concepts abstraits ? En maths, la fameuse "méthode de Singapour" propose de partir de situations concrètes et de schémas très simples. On manipule et on dessine avant de passer aux chiffres et aux formules abstraites.
un petit garçon apprend à compter avec un boulier

Méthodo Campus consacre le deuxième module du parcours « Apprendre à apprendre » à la compréhension et la représentation des concepts abstraits. Plus un élève avance dans ses études, et plus les notions théoriques s’accumulent, s’enchaînent et se complexifient. Or si l’on n’a jamais réellement compris le sens des premiers concepts abstraits, il est difficile de les utiliser correctement dans des problèmes de niveau supérieur ou des situations nouvelles.

J’aime pas les maths !

Les mathématiques en sont un bon exemple, car leur langage utilise un grand nombre de concepts abstraits. Cela commence par les nombres sur lesquels on réalise des opérations arithmétiques et qui se déclinent en de multiples formes (nombres relatifs, décimaux, puissances, racines carrées…) avec leurs règles d’écriture et de calcul.

Or comment manipuler correctement ces concepts si l’on n’en a pas compris profondément le sens ? C’est ainsi que les élèves français – d’après les études et les enseignants – auraient beaucoup de mal, dès le collège, à travailler correctement sur les fractions. A comprendre que 1/6 n’est pas plus grand que 1/3, même si 6 est plus grand que 3.

Faute d’avoir compris en profondeur le sens des notions mathématiques de base, beaucoup d’élèves se contentent d’appliquer des formules

La difficulté ne fait que s’amplifier lorsqu’on aborde en seconde l’univers des fonctions, des statistiques ou de l’algorithmique. Faute d’avoir bien compris les premiers termes de ce langage, un grand nombre d’élèves se contentent d’appliquer des formules. Ils sont alors souvent incapables de résoudre des problèmes plus avancés, car incapables de repérer quel raisonnement ou quelle propriété employer. Inutile de dire que dans ces conditions, personne n’aime les maths !

La méthode de Singapour, c’est quoi ?

Il aura fallu l’accumulation des « mauvaises notes » des élèves français et surtout des bons résultats de certains pays comme Singapour pour qu’on admette, enfin, qu’il fallait peut-être s’inspirer de ce qui marche. Or qu’est-ce qui caractérise le plus cette fameuse « méthode de Singapour » ? C’est qu’elle prend le temps, justement, de donner du sens aux concepts mathématiques abstraits avant d’enseigner les règles, les formules et les techniques de calcul.

Dès le primaire, pour aborder les notions d’addition, de soustraction, de multiplication, de division ou de fraction, on part de situations concrètes : pizza à partager, cubes à empiler, billes à répartir dans des sacs, enfant qui a le double, ou la moitié d’un autre… Souvent, dès le début, un petit problème est posé.

Exemple* :

« Pierre a une collection de 1 170 timbres. Il possède 4 fois plus de timbres français que de timbres étrangers. Combien de timbres français Pierre a-t-il dans sa collection« 

On part donc du concret, mais pour avancer, on passe systématiquement par l’image en utilisant des schémas en barres, comme celui-ci qui clarifie tout de suite les notions de multiplication et de division :

En même temps, l’élève est invité à verbaliser tout son raisonnement en mettant « un haut-parleur sur sa pensée » : « J’ai un paquet de timbres étrangers, et 4 paquets de timbres français… »

* : cet exercice est extrait de l’ouvrage « Je m’entraine en maths avec la méthode de Singapour« , niveau CM2-10-11 ans, à La Librairie des écoles, éditeur qui publie depuis plusieurs années une adaptation de la méthode aux élèves français.

Raisonner avec ses mains et son crayon avant de le faire dans sa tête

Des mains manipulent en tout sens un jeu de Rubik's cube.

La méthode avance ainsi en accumulant les situations concrètes nécessitant de manipuler les objets pour permettre à l’élève de bien s’approprier les diverses notions. Avant de passer au langage purement mathématique (abstrait), on utilise la médiation de tous les autres langages : le langage du corps lorsqu’on manipule des cubes ou des boules, le langage visuel des schémas et des figures géométriques, le langage verbal lorsqu’on explique sa démarche avec des mots…

En géométrie, la manipulation peut être particulièrement efficace. Plutôt que de faire apprendre de but en blanc que « la somme des angles d’un triangle est égale à 180° », la méthode propose à l’élève de dessiner un triangle. Puis il doit en colorier les angles, découper le triangle en trois morceaux sans abimer les angles et assembler ceux-ci côte à côte. Ils s’ajustent alors clairement sur une ligne droite et forment bien ensemble un angle de 180° (CQFD !)

"Quelle est la somme des 3 angles ?" se demande une élève face à l'assemblage des trois angles d'un triangle.
Illustration issue de l’ouvrage « Je m’entraîne en maths avec la méthode de Singapour (CM2) » Ed. La librairie des écoles, p. 145.

Une fois la notion bien intégrée par ce passage dans le concret, l’image et les mots, l’élève peut « installer » dans sa tête le concept abstrait et la formule mathématique. Le calcul ou le raisonnement peut devenir mental.

Savoir penser « dans sa tête » ou mentaliser

L’équipe de Méthodo Campus n’est certes pas spécialiste de cette méthode de Singapour que l’Education nationale veut introduire du primaire au lycée. Sa démarche rejoint cependant plusieurs de nos conseils méthodologiques basés sur la constatation qu’il faut comprendre pour bien apprendre. Tant que l’on n’est pas capable d’expliquer ou de manipuler un concept de diverses manières, on ne peut pas l’utiliser à bon escient dans un devoir ou un raisonnement.
C’est pourquoi le module 2 de notre parcours s’attache à améliorer la « mentalisation » des notions abstraites. Un exercice propose par exemple de se représenter une notion de quatre façons : à travers du concret, puis une formule, des applications, et enfin une version laissant cours à l’imagination. Une page invite aussi à développer le langage visuel, en faisant par exemple des schémas, des croquinotes ou des cartes mentales

Cela rejoint totalement l’esprit de la méthode de Singapour qui est de « manipuler » en tout sens un concept pour se l’approprier totalement.

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Michèle Longour

Michèle Longour

Journaliste Education & Apprentissage, auteur et fondatrice du projet Méthodo Campus.

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