On vous l’a dit et redit : pour faire un exposé oral clair et convaincant, il faut organiser son propos et ses idées en faisant un plan. Mais il y a un piège : c’est de chercher à tout prix à « remplir » votre plan de façon purement formelle, plutôt que de partir de vos idées.
Je vais à nouveau prendre l’exemple du Grand oral du bac et en particulier la question délicate de l’introduction.
Beaucoup de ceux qui vous expliquent comment s’y prendre se contentent de dire qu’il faut faire une introduction, un développement et une conclusion.
Attention aux introductions creuses et ennuyeuses
Ce n’est bien sûr pas faux, mais n’est pas d’une grande utilité si l’on ne vous dit pas comment introduire, ou que dire dans votre introduction. De nombreux candidats se contentent de démarrer, par exemple, en répétant leur sujet. D’autres le délayent en paraphrasant, ce qui finalement, leur fait perdre du temps. Autre erreur : enfiler les généralités et les banalités avant d’arriver à sa question. Encore une perte de temps (vous n’avez que 5 minutes !) et une introduction qui risque d’ennuyer.
Or, dans un oral, ce sont les tout premiers instants qui permettent de capter l’attention de son auditeur. En tout cas qui donnent le ton et peuvent déjà faire bonne impression (ou pas) sur l’examinateur.
Démarrez directement avec une anecdote marquante
Plutôt qu’un démarrage plat et un peu ennuyeux, tâchez donc d’attaquer de façon plus directe, et si possible brillante. Comment ? L’astuce consiste à partir non pas d’une vérité générale connue de tous, mais d’une anecdote ou d’un fait précis qui va d’emblée éveiller l’intérêt de l’auditeur.
Si votre question est par exemple : « En quoi les méthodes d’agriculture intensives menacent-elles la biodiversité ? »; vous pouvez commencer par un exemple. « En 2023, une espèce d’oiseau commune, les piverts, ont diminué de 50% dans les jardins en France« . (L’exemple ici est purement virtuel.)
Si vous pouvez introduire un facteur personnel, c’est encore mieux : « En 2019, en me promenant dans le parc X, j’ai pu observer plusieurs piverts dans les arbres. Quatre ans plus tard, j’ai cherché en vain à observer des piverts dans ce parc et en m’informant auprès de la Ligue de protection des oiseaux, j’ai appris que les populations de piverts en France ont diminué de 50% en dix ans« .
En disant « je » dans cette première phrase, vous montrez subtilement votre intérêt pour le sujet. Mais si vous n’avez aucune évocation personnelle à faire, surtout, n’inventez rien ! Vous pouvez aussi bien partir d’un fait d’actualité, d’une citation, d’une statistique, d’un jeu de mots… du moment que cela vous permet de passer pertinemment et facilement de ce fait particulier à la question plus générale que vous allez traiter. « Si les piverts sont menacés de disparition, c’est à cause de l’utilisation par les exploitants agricoles locaux de produits chimiques qui ont pollué l’écorce des arbres que picorent les piverts. Or ces produits sont utilisés couramment par l’agriculture intensive. »
Elargissez pour présenter votre sujet… sans mots inutiles
Vous pouvez alors annoncer votre sujet : « On voit à travers cet exemple que certaines méthodes agricoles peuvent menacer des espèces vivantes et appauvrir la biodiversité. Comment ? A travers deux grands mécanismes que je vais vous présenter maintenant : la pollution des écosystèmes, et la destruction des milieux naturels,
Vous voyez que l’on introduit bien les idées dont on va parler mais sans multiplier les mots inutiles. Comme vous n’avez que 5 minutes en tout, vous n’avez pas le temps, par exemple, d’annoncer l’architecture précise de votre plan, avec ses parties et sous-parties : « Dans une première partie, nous verrons tout d’abord comment… » Si vous passez 3 minutes sur 5 à introduire, vous n’aurez finalement plus le temps de dire grand chose ensuite !
Ne perdez pas trop de temps non plus à expliquer dans l’introduction quelles parties du programme de spécialité sont liées à votre question : vous pouvez juste évoquer le thème, et faire ce lien plus longuement au cours de l’exposé, au moment où vous évoquerez ou utiliserez la notion étudiée.
Bref, entrez rapidement dans le vif du sujet. Cela ne veut pas dire que vous n’aurez pas préalablement soigneusement construit votre présentation selon un plan précis : mais cette préparation faite « en coulisses » durant vos révisions doit rester invisible le jour J, un peu comme le patron utilisé pour tailler un vêtement disparait dans la couture finale.
Présenter sa thèse en 180 secondes, c’est possible !
Un exemple brillant nous est fourni par les jeunes chercheurs qui participent chaque année, en France et dans le monde, au concours MT180. Le challenge est pour eux d’exposer à un grand public non spécialiste le sujet de la thèse de doctorat sur laquelle ils travaillent depuis plusieurs années, et cela en 3 minutes soit à peine 180 secondes !
Ces thèses portent en général sur des sujets scientifiques très pointus, comme par exemple celle d’Anaïs Perrichet, chercheuse en biologie cellulaire qui a titré sa thèse : « Ciblage de l’IL-1 pour augmenter l’efficacité de la chimio-immunothérapie dans le cancer »
Je vous laisse découvrir sa prestation lors de la finale nationale 2022 :
Comment démarre Anaïs ? D’emblée, elle surfe sur le concept de guerre : « Guerre de religions, guerre économique, guerre de gangs… » Pour arriver à la petite phrase qui est la clé de toute sa présentation : « le cancer, c’est une guerre ».
La métaphore est si bien trouvée qu’elle lui permet d’expliquer en quelques secondes le rôle de sa molécule IL-1, l’enjeu de ses recherches, sa méthodologie et ses résultats ! Vous voyez que dans son cas, le succès se jouait dans le choix des premiers mots. (En savoir plus sur le concours MT180).
Trouvez un fait pertinent / à la question centrale
Au grand oral du bac, on ne vous demande pas de « filer la métaphore » c’est-à-dire de vous servir de votre accroche initiale durant tout l’exposé. Dans le concours Mt180, c’est la brièveté du temps imparti qui conduit les orateurs à de telles prouesses.
Mais par contre, tâchez de trouver un fait pertinent qui vous place d’emblée au coeur de votre sujet. Bien sûr, cela veut dire que vous avez trouvé un bon sujet, c’est-à-dire une question liée à une notion théorique étudiée en classe, mais un peu décalée tout de même.
Mathématiques : le bon exemple des jeux de hasard
Voici un exemple tiré de l’ouvrage parascolaire « Mission grand Oral, Maths Physique-Chimie » édité par Nathan sous la direction d’Olivier Jaoui (qui anime des webinaires sur le sujet). Le sujet donné en page 96 est : « Comment calculer ses chances de gagner dans un jeu de hasard ? ».
Et voilà l’introduction proposée :
« Selon une enquête de 2019, publiée sur le site de L’Observatoire français des drogues et des toxicomanies, 47,2% des Français ont joué au moins une fois à un jeu d’argent et de hasard au cours de l’année écoulée. Par exemple certains membres de ma famille sont des joueurs réguliers. Cela m’a donné l’idée de m’interroger sur les jeux de hasard et le calcul des chances de gagner à ces jeux, d’autant plus que cela fait appel à des notions de terminale en spécialité mathématiques : le dénombrement et la combinatoire.«
Je vous laisse lire la suite dans l’ouvrage si le sujet vous intéresse, et cela vaut la peine car l’élève (virtuel) traite le sujet en prenant l’exemple d’un jeu précis…
Mais retenons que cette introduction :
- part d’une donnée statistique précise et sourcée
- réfère à un fait de société qui ne laisse personne indifférent
- comporte une note personnelle qui explique le choix de sujet par l’élève
- relie la question choisie à une notion scolaire.
Bref, elle coche toutes les cases pour capter positivement l’opinion des enseignants. Et vous assurer sans doute une bonne note.
Pour en savoir plus :